La Princesse Grenouille

Fiche technique
Nom originalCarevna Lyagushka (Царевна-лягушка)
OrigineRussie
Année de production1954
ProductionSoyuzmultfilm
Durée39 min. env.
RéalisationMikhail Tsekhanovski
ScénariiMikhail Volpine
AnimationFedor Khitruk, Nikolai Fedorov, Boris Chani, Konstantin Malychev, Vladimir Danilevich, Tatiana Taranovitch, Roman Kachanov, Victor Likhachev, Boris Meyerovich, Vadim Dolgikh
Direction artistiqueLev Milchin, Alexander Beliakov
Direction du sonGeorge Martynuk
DécorsV. Valerianova, Petr Korobayev, Irina Troyanova
MontageLidia Kyaksht
Direction photographieA. Astafyev
MusiquesYoury Levitine
Direction de doublagePatricia Angot (1er doublage)
Diffusions
1ère diffusion hertzienneJuillet 1989 (FR3 - Sam'Dynamite)
1ère diff. Cable/Sat/TNT11 février 1995 (Canal J)
Rediffusions30 décembre 1989 (FR3 - Sam'Dynamite)
6 janvier 1996 (Canal J)
Editions
Sortie en VHS1988 (Antarès - VCP - Travalling - Réglisse collection)
1996 (Citel)
Sortie en DVDLes trésors de l'animation (Citel - Les trésors de l'animation)
Synopsis

Vassilissa la Belle se fait enlever par l'enchanteur Kochtcheï qui la transforme pendant trois années et trois jours en grenouille et ce, pour avoir rejeté sa demande de mariage.
Peu de temps après, le tsar souhaitant voir ses trois fils mariés, leur ordonne de partir chacun de leur côté et de décocher une flèche qui leur indiquera où trouver une épouse. Si les deux frères aînés trouvent l'âme sœur, la flèche d'Ivan, le plus jeune, tombe entre les mains de la princesse grenouille et se voit contraint de l'épouser.
Un banquet est organisé en cet honneur : Vassilissa ayant repris forme humaine danse avec son bien-aimé avant de disparaître. Courant à sa chambre, Ivan découvre une dépouille de grenouille qu'il s'empresse de brûler. Le sortilège de Kochtcheï n'étant pas arrivé à échéance, Vassilissa est condamnée à rejoindre le sorcier. Ivan devra alors parcourir le pays et affronter Kochtcheï pour délivrer son épouse.

Commentaires

Pilier de l’animation soviétique, Mikhail Tsekhanovski décide au début de l’année 1953 d’adapter en dessin animé un grand classique de la culture populaire russe : le conte de La Princesse Grenouille auquel il consacrera 2 ans de production.
Fidèle aux fondements de l’animation soviétique portés par le studio Soyuzmultfilm, le réalisateur déploie une narration lente et sans fioritures, avec des décors et des personnages réalistes pour faciliter l'identification. Dans un souci constant de s’adresser aux enfants tout en se détachant du modèle américain, l’animation repose ici principalement sur la rotoscopie, procédé que Tsekhanovski avait commencé à expérimenter sur ses deux précédents films, Le Conte du pêcheur et du petit poisson (1950) d’après Alexandre Pouchkine et Kashtanka (1952) d’après Anton Tchekhov ; certains de ses collègues y auront également recours, comme Lev Atamanov sur La Belle et la Bête (1952). Si les animateurs russes ont toujours eu à cœur de glorifier le patrimoine national en cherchant à donner vie aux illustrations de livres de contes – en particulier celles de l’artiste Ivan Bilibine –, Tsekhanovski choisit sur La Princesse Grenouille de radicaliser sa mise en scène, la rendant plus que jamais proche du théâtre. Le film entier repose sur une conception latérale de l’espace avec très peu d’exploitation de la profondeur de champ et un découpage basé sur des raccords dans l’axe, ainsi que des plans en mouvements réduits au minimum. Pourtant, loin de paraître artificiel ou de pré-annoncer les mises en scène standardisées du futur studio Hanna-Barbera (qui visera la production de masse pour la télévision), ce minimalisme scénique débarrasse le conte d’origine de tous les oripeaux formels du cinéma de divertissement pour toucher à une forme de pureté. Les personnages-archétypes du conte sont livrés dans toute leur simplicité, résonnant sans détour dans l’inconscient du spectateur, via la rotoscopie qui leur donne chair et âme tout en sublimant leur gestuelle ample, ainsi qu’avec les dialogues réduits à l’essentiel. La splendeur des décors, richement colorés, et les orchestrations de Youry Levitine achèvent de dresser un cadre empreint de majesté, d’autant plus valorisé par la sobriété de la mise en scène. Ce parti-pris radical, entre narration épurée à l’extrême et précision graphique, fait de La Princesse Grenouille une œuvre à part – probablement l’un des joyaux du studio Soyuzmultfilm – qui sera récompensée en 1960 d’un prix au Festival International de Cinéma de Mar del Plata en Argentine.

Bien que la version française diffusée à la télévision en 1989 respecte le découpage et les dialogues de la version originale, des différences sont néanmoins notables du point de vue de la bande-son. Les thèmes musicaux de Levitine sont en effet moins nombreux que dans la version originale ; il en résulte un montage sonore différent qui aménage certains moments de silence et répète quelques morceaux parmi les plus signifiants du point de vue symphonique. Ainsi, la musique de l’enlèvement de Vassilissa est répétée lors de l’arrivée d’Ivan devant la maison de Baba Yaga, tel un motif en miroir inversé pour Kochtcheï. De même, le thème musical sombre aux accents proches de Moussorgski qui accompagne Ivan dans la dernière partie du film (ses préparatifs avec l’aide de Baba Yaga et sa confrontation avec Kochtcheï) est très tôt utilisé dans la version française, lors de la première apparition du tsar et de ses fils : la scène revêt dès lors un caractère plus solennel. Enfin, la musique du bal – point d’orgue poétique du film – avec sa mélodie mémorable est utilisée durant la rencontre entre Kochtcheï et Vassilissa, le départ de cette dernière transformée en cygne et durant la scène entre Ivan et le vieil ermite ; le morceau devient dans cette version le leitmotiv du film qui prend alors diverses couleurs en fonction de la scène. Si ce choix artistique peut être contesté, il n’en demeure pas moins respectueux de l’esprit de l’œuvre d’origine et lui confère même un certain caractère en exploitant intelligemment l’atmosphère portée par la musique de Levitine.
On ne saurait toutefois en dire de même pour la version française de 1995 : à la chute du régime communiste, un ancien acteur soviétique émigré aux États-Unis du nom d’Oleg Vidov rachète une bonne partie du catalogue de Soyuzmultfilm pour le compte de sa société Films by Jove. Si des copies en mauvais état ont pu être restaurées, des films comme La Princesse Grenouille, L’Antilope d’Or, Les Cygnes sauvages ou La Reine des Neiges ont par contre fait l’objet d’une refonte destinée à "moderniser" ces œuvres et à les ouvrir au marché américain : réunies sous le label Les Contes De Mon Enfance, ces versions supervisées par Film Roman Productions proposent un remontage avec des scènes coupées, des musiques entièrement changées et de nouveaux dialogues. Assurée par la scénariste Sindy McKay, cette nouvelle version du film de Tsekhanovski perd grandement de sa superbe avec ses personnages devenus soudainement bavards, commentant ce que l’on peut voir à l’image, répétant en voix-off ce qui s’est dit il y a quelques secondes et faisant preuve d’un humour puéril qui tombe à plat (à titre d’exemple, le tsar passe du personnage guindé mais amusant à un être méprisant, de plus associé à un thème musical clownesque aux cuivres ronflants qui le ridiculise complètement). Les arrangements pompeux à base de synthétiseurs et de sonorités compressées écrasent l’image sans proposer de thème véritablement accrocheur, tout comme les voix qui sonnent de façon trop propre et près de 4 minutes d’animation sont supprimées (notamment la scène chantée où les épouses des deux frères délèguent le tissage du tapis, ce qui retire une bonne partie de leur caractérisation).

Si Mikhail Tsekhanovski fut l’auteur de la première adaptation animée du conte, le cinéma en prise de vues directes s’y était déjà penché avec Vassilissa la Très Belle réalisé par Alexandre Rou en 1939 et d’autres versions animées virent le jour par la suite.
Le marionnettiste Youriy Eliseev livrera sa propre version en 1971 ; le studio Soyuzmultfilm proposera deux autres dessins animés, Vassilissa la Belle réalisé par Vladimir Pekar en 1977 avec un style graphique plus proche des arts décoratifs russes, et La Magnifique Grenouille réalisé par Elvira Avakian en 2008. Enfin, Les Contes de Masha (spin-off de la série 3D ultra-populaire Masha et Mishka) consacrera un de ses épisodes à La Princesse Grenouille en 2012.
Concernant le Grand Classique Disney de 2009 intitulé La Princesse et la Grenouille, celui-ci est librement tiré d’un roman d’Elizabeth Dawson Baker publié en 2002 qui au-delà de son titre The Frog Princess n’a rien à voir avec le conte russe d’origine.

Merci à markyoloup pour l'identification des voix du second doublage.

Doublage
Voix françaises (Studio Télétota) :
Premier doublage:
Bernard MétrauxPrince Ivan
Monique ThierryVassilissa, Baba Yaga, la femme du frère cadet
Gérard HernandezKochtcheï
Philippe DumatLe Tsar, la maman ourse
Danièle HazanLa femme du frère aîné, la louve, l'oiseau, l'oisillon, le brochet
Raoul DelfosseLe vieil homme
Jean BarneyNarrateur, le frère aîné, le frère cadet
Second doublage:
Jacques LussierPrince Ivan
Elise BertrandVassilissa
Yves MassicotteKochtcheï
Vincent DavyLe Tsar
Flora BalzanoBaba Yaga
Auteur : Klaark
Modifs/Ajouts : Arachnée
Doublage : Arachnée
Sources :
http://www.animator.ru/
Nadezda Fadina, Fairytale Women : Gender Politics in Soviet and Post-Soviet Animated Adaptations of Russian National Fairytales, thèse de doctorat, Université de Bedfordshire, 2016.
Lauren Dehgan, Baba Yaga, construction et évolution d’un mythe animé en Russie, Slovo n° 48-49, 2019.
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Carevna Lyagushka © Soyuzmultfilm
Fiche publiée le 19 octobre 2007 - Dernière modification le 28 novembre 2020 - Lue 31447 fois