Fiche technique
Nom original | Rock & Rule |
Origine | Canada |
Année de production | 1983 |
Production | Nelvana |
Durée | 78 minutes |
Auteur | Patrick Loubert, Peter Sauder |
Réalisation | Clive A. Smith |
Production | Patrick Loubert, Michael Hirsh |
Scénarii | Peter Sauder, John Halfpenny |
Story-boards | Raymond Jafelice, Patrick Loubert, Michael Hirsh, Clive A. Smith |
Animation | Anne-Marie Bardwell, Darlie Brewster, Charlie Bonifacio, Robin Budd, Chuck Gammage, Frank Nissen, Bill Speers, Tom Sito, John Celestri, Roger Allers, Devanand Ramsaran, Terry Godfrey, Wendy Perdue, Elaine Despins, Dale Schott, John Laurence Collins, Louis Scarborough, Larry Jacobs, Ken Stephenson, Ralf Palmer |
Effets Spéciaux | Keith Ingham (direction), Willy Ashworth, Gord Ellis, Debra Armstrong , Linda Roy (2), John Laurence Collins, David Thrasher, Peter Yamasaki, Mary Ellen Young |
Chara-Design | Frank Nissen, Charlie Bonifacio (assistant), Dale Cummings (assistant), Chuck Gammage (assistant) |
Design | Louis Krawagna, Don Marshall, Paul Rivoche |
Direction de l'animation | Ken Stephenson |
Direction artistique | Clive A. Smith, Louis Krawagna |
Direction des décors | Louis Krawagna |
Décors | Peter Moehrle, Maureen Paxton, Michael Doraty, Julie Eberley, Wayne Gilbert |
Direction du layout | Raymond Jafelice |
Layout | Jim Craig, Michael Merrill, Scott Caple, David Ross, Arna Selznick, Don Marshall, Franc Reyes, Dale Cummings, Verne Andrusiek |
Montage | G. Scott LaBarge |
Direction photographie | Lenora Hume |
Musiques | Patricia Cullen |
Diffusions
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1ère diff. Cable/Sat/TNT | 2000 (MCM) |
Synopsis
Dans un futur post-apocalyptique, les animaux ont évolué pour devenir les nouveaux habitants de la Terre. Parmi ces êtres se distingue Mok, véritable légende vivante du rock dont les effets spéciaux utilisés durant ses concerts ont progressivement laissé place à la magie. Mais la star est sur le déclin et nourrit le noir dessein d’utiliser ses connaissances pour invoquer un démon venu d’une autre dimension afin de livrer son concert ultime et d’asseoir sa suprématie sur le monde entier. Toutefois, pour ouvrir la porte menant vers l’Autre Monde, celui-ci aura besoin d’une voix aux modulations très spécifiques. Angel, une jeune chanteuse repérée dans un bar de la ville d’Ohmtown, possède cette voix.
Mais c’est sans compter sur les autres membres de son groupe, composé d’Omar (son compagnon chanteur), de Dizzy (le batteur) et de Stretch (le bassiste), qui ne vont pas l’abandonner aussi facilement entre les mains de Mok.
Commentaires
Michael Hirsch, Clive A. Smith et Patrick Loubert fondent les studios Nelvana à Toronto en 1971 avec pour ambition de devenir des acteurs majeurs de l’animation télévisuelle canadienne. Après avoir produit un documentaire sur la bande dessinée locale et des programmes spéciaux mêlant dessin animé et prises de vues directes, le succès arrive avec leurs premiers courts-métrages A Cosmic Christmas (1977) et The Devil and Daniel Mouse (1978). Ce dernier film en particulier – qui propose une relecture du mythe de Faust avec une souris aspirant à devenir une rock star – recèle un fort potentiel selon ses créateurs qui vont alors entreprendre de l’adapter en long-métrage pour le cinéma. Nommé Drats, le projet est d’abord envisagé comme un conte de fées destiné aux enfants mais les multiples idées des producteurs et scénaristes vont progressivement en faire un film sombre visant davantage le public adolescent et adulte.
Malgré une pré-production hasardeuse (le tournage étant lancé avant l’achèvement du scénario), Nelvana voit les choses en grand en réunissant une large équipe d’animateurs (avec de futurs grands noms du milieu comme Tom Sito ou Frank Nissen) et en faisant appel aux derniers effets spéciaux à la pointe : sont notamment utilisées la caméra multiplane dirigée par ordinateur pour les plans en mouvement, ainsi que les images de synthèse encore émergentes à cette époque pour l’interface de l’ordinateur de Mok. La bande originale n’est pas en reste puisqu’on y retrouve Cheap Trick, Debbie Harry du groupe Blondie, Lou Reed, Iggy Pop et Earth, Wind & Fire. Ayant vent du projet, Ivan Reitman approche même l’équipe pour leur proposer de participer à Métal Hurlant, ce que Clive Smith refuse pour se consacrer pleinement à Rock & Rule.
Au terme d’une production étalée sur 5 ans, le film connaîtra malheureusement un destin semblable à celui de Danny, le Chat Superstar : en 1981, son distributeur United Artists est racheté par la MGM. Loin d’être aussi enthousiastes que leurs prédécesseurs, les dirigeants de la firme ne savent pas comment vendre le film et réclament des changements de script. La situation, en plus des multiples expérimentations de l’équipe pour les effets spéciaux, mène à un dépassement de budget laissant Nelvana au bord de la banqueroute. Des modifications sont apportées au montage d’origine : le comédien Gregory Salata, chargé de la voix d’Omar, est remplacé par Paul Le Mat, certaines de ses répliques sont changées car jugées trop grossières et près de 20 secondes de film sont coupées.
En 1983, le film sort enfin sur les écrans américains sous le titre Ring of Power, sans aucun soutien de la part de la MGM qui ne lui accordera qu’une exploitation d’une semaine dans une poignée de salles et laissant Clive Smith assurer tout seul la promotion dans les stations de radio. Sur un budget total de 8 millions de dollars, Rock & Rule n’en rapportera que 30.379 et Nelvana fut forcé de se reconvertir dans les séries télé pour enfants pour survivre. Toutefois, le film deviendra culte sur le continent américain au fil des rediffusions télé et de son arrivée sur support VHS (dont des éditions pirates qui créditeront étrangement le nom de Ralph Bakshi à la réalisation). L’édition DVD arrive là-bas en 2005 en proposant dans une édition collector la version américaine et la version originale canadienne (dans une copie VHS numérisée pour cette dernière, le négatif original ayant été détruit dans un incendie).
Du côté de la France, le film n’a été diffusé qu’une seule fois en 2000, dans une version sous-titrée, faute de doublage francophone. Malgré cette absence de reconnaissance, Rock & Rule demeure l’un des chefs-d’œuvre animés des années 80. Son sens de la démesure graphique et ses personnages attachants le placent en parfait homologue animé du Phantom of the Paradise (1974) de Brian de Palma. L’animation, très fluide, est d’une qualité irréprochable, quels que soient les registres gestuels (facilités par l’anthropomorphisme des personnages) : réaliste pour Angel et Omar, cartoonesque pour les seconds rôles et maniéré pour cette grande réussite qu’est Mok, improbable fusion entre Mick Jagger, Lou Reed, Iggy Pop et David Bowie. La mise en scène reste particulièrement en avance sur son temps, avec un travail très élaboré autour des atmosphères et des effets de lumière ; le personnage du démon réunit à lui seul plus d’une dizaine d’effets spéciaux pour retranscrire son côté bouillonnant et menaçant, et certaines scènes – comme le dialogue entre Angel et Mok dans le jardin ou le club anti-gravité – constituent de grands moments de cinéma. Le scénario prolonge intelligemment l’histoire de The Devil and Daniel Mouse en proposant une véritable célébration du rock’n’roll. Certaines références à la drogue et au sexe sont distillées ici et là, sans pour autant être élevées en arguments de vente comme dans le cas de Métal Hurlant ; le charme du film vient précisément de cette alliance entre l’aspect cocasse de certains personnages et le caractère sombre et adulte du monde. Et son échec au box-office a mis fin à une certaine approche de l’animation par les studios Nelvana qui ont signé ici une œuvre unique à (re)découvrir d’urgence.
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