Synopsis
Boboc est un petit garçon dont la particularité est de pouvoir changer de couleur quand cela lui chante et même et surtout sans en avoir conscience puisque c'est pour lui comme une respiration. Il passe ainsi régulièrement d'une couleur à une autre, ses émotions et les évènements qui l'entourent ne semblant avoir que peu d'influence sur ce flux continu. Aussi tel un caméléon, il peut parfois passer inaperçu selon l'endroit où il se trouve et la couleur qu'il prend à tel instant. Dans ses aventures de héros professionnel, il est accompagné de ses fidèles amis : Boc, la chauve-souris à pois rouges et Boloboc, le chien à carreaux et au petit museau tout aussi rouge que les pois de Boc. Si la première est très attentionnée et heureuse de partager moult pérégrinations avec Boboc, le second à un caractère un peu grognon et il se plaît à rester chez lui quand les circonstances ne l'obligent pas à en sortir.
Ce trio tels des mousquetaires comme ils le chantent va devoir contrecarrer les mauvaises actions du terrible Harpadjik, chef de la redoutable O.P.E.S.K.O. (Organisation pour l'encouragement scientifique à la kleptomanie offensive). Mais avant cela, alors qu'ils sont partis une nouvelle fois à l'aventure, le chemin qu'ils ont pris les conduit à Katchalma, une ville étrange où tout est gris, des maisons à ses habitants. En ce lieu, qu'ils visitent sous les regards inquiets de la population, les forces de l'ordre les arrêtent et les emmènent au palais de justice où ils sont accusés de par les couleurs qui les couvrent de tentative de complot, manœuvre de corruption et essai de restauration. Le roi Grinosol énonce alors la sentence : ils sont condamnés à être décoloré le lendemain... Fort heureusement, quelques protagonistes s'ajouteront à l'aventure apportant leur aide à Boboc et ses amis : Pitik, l'inventeur lunatique et Bouboulak, le roi en exil, ainsi que la journaliste-robot du quotidien Robot Soir prénommée Aprousar (personnages se présentant eux-mêmes dans le premier épisode, après le trio).
Commentaires
Les aventures de Boc, Boboc et Boloboc sont nées sur scène en 1969 en un spectacle pour enfants (à partir de 5 ans environ) créé et mis en scène par Camillo Osorovitz (1936-, peintre, illustrateur et scénographe) avec la collaboration de Henri Delmas avec lequel il a déjà partagé quelques travaux scéniques (les premières représentations de Boc, Boboc et Boloboc ont lieu les après-midi du 17 au 21 février 1969 au Studio 43 à Paris, ainsi que les après-midi du mercredi 14 au dimanche 18 janvier 1970 au Théâtre de la Commune à Aubervilliers). L'artiste aux origines roumaines – en 1945-46 il étudie au collège national Saint-Sava / Sfântul Sava, à Bucarest, ville où il travaillera en tant que scénographe jusqu'au début des années 60 quittant peu après son pays dont le pouvoir va passer d'un stalinien à un dictateur... –, fort alors de son expérience de scénographe et de costumier, notamment depuis peu pour José Valverde ou Maurice Yendt adaptant des contes d'Andersen, proposera à son jeune public, dans le même temps que les aventures de Boboc et ses amis ou tout du moins quelques mois plus tard, une adaptation des Voyages de Gulliver de Jonathan Swift (quelques représentations de cette pièce sont données les après-midi du mercredi 7 au dimanche 11 janvier 1970 au Théâtre de la Commune à Aubervilliers).
Dans la création scénique, l'histoire est légèrement différente de celle présentée deux ans plus tard à la télévision. En effet Boc, Boboc et Boloboc y sont présentés vivants dans une ville à l'atmosphère grise et terne, les responsables municipaux ayant vendu les couleurs des habitations et des différents lieux de l'agglomération à un directeur de cirque quelque peu malintentionné. Le trio d'amis, désireux de redonner sa coloration à ce petit monde, décident ainsi d'attendre que la Lune monte dans le ciel quand elle surgit de la mer pour s'y accrocher et s'élever dans les cieux afin de partir dans l'espace à la recherche des couleurs perdues. C'est alors un voyage qui se poursuit de planète en planète jusqu'à se retrouver au cœur d'une guerre fortement colorée entre les papillons et les fleurs... Évidemment en cette année de 1969, voyager dans l'espace cosmique et même un peu plus loin encore avec l'aide de la Lune fait écho au grand évènement ayant lieu en juillet, à savoir celui du véritable voyage d'Apollo 11 vers le satellite. Le noir de l'espace est également un décor particulièrement adéquat pour faire ressortir avec force les couleurs qui s'y déploient.
Dans l'adaptation télévisée, la trame de l'histoire jouant avec la disparition des couleurs est reprise mais avec certaines distinctions puisque l'espace n'est plus le décor principal où se déroule une grande partie de l'aventure. Boc chante ainsi de la Voie lactée à l'étoile Polaire, on a sillonné le Système solaire, ce qui par ailleurs est assez confus puisque l'étoile Polaire se trouve dans notre galaxie..., et Boloboc de poursuivre dans les galaxies, nous les mousquetaires, chassons l'ennemi, interplanétaire. De plus, le premier épisode est totalement consacré à la présentation de ce petit univers, de sa création propre à son imaginaire. A cet égard, chaque épisode était introduit par une séquence présentée par un jeune garçon âgé d'environ dix années et prénommé Patrice, se présentant lui-même comme le fils du créateur de Boboc et de ses amis. Il intervenait encore au cours de l'épisode quand quelque action particulière avait besoin d'éclaircissements et à la fin. Dans le cadre de l'ORTF, sa présence au début de l'épisode faisait légèrement écho à celle d'un certain Pépin, jeune enfant « annonçant » deux ans plus tôt lui aussi la venue de personnages – de figurines animées en stop motion – dans la série Pépin la bulle (1969) mais celui-ci n'intervenait pas dans le cours de l'histoire et la séquence qui le mettait en scène était en fait toujours la même en guise de générique alors que le jeune Patrice joua son rôle d'hôte et d'accompagnateur tout le long de la série. On pense également et de même en stop motion au Petit Lion (1967) dont le jeune enfant faisait acte comme Pépin d'une très courte présence.
On s'amusera à voir dans le premier épisode, après l'introduction de Patrice, la présentation des personnages se présentant eux-mêmes, puis l'au revoir de Patrice à la fin de cet épisode suivi de suite d'une dernière séquence où le méchant de l'histoire ne l'ayant pas encore été, se présente lui aussi tout en soulignant que sa présence dissimulée aux téléspectateurs est indispensable car sans lui il n'y aurait pas d'histoire... peut-être est-ce aussi de l'Histoire avec un h majuscule que veut de la sorte évoquer Camillo Osorovitz, un certain Ceausescu faisant alors l'Histoire en son pays.
Quelques années plus tard, en 1985, adaptant l'un de ses albums jeunesse qu'il a signé en 1980, Camillo Osorovitz met en scène au Théâtre national de Chaillot un spectacle intitulé Le Violon violet, une histoire de coloration à nouveaux où il usait encore de certains procédés mis en action sur Boboc. D'ailleurs, comme pour ce dernier à la télévision, il fit participer à cette œuvre un autre de ses enfants, à savoir sa fille Barbara Osorovitz qui en composa la musique (en 1987, pour les éditions OK, elle écrira également un texte pour un enregistrement sonore sur Les Instruments de musique lu par l'acteur Dominique Paturel et toujours pour les mêmes éditions, elle participera à quelques travaux de son père en œuvrant sur des albums jeunesse à caractère éducatif ; elle est devenue depuis une luthière des plus estimées en sa profession).
Il usa également de la même formule scénique pour le spectacle Les Mille et une nuits composé de trois pièces : « Ali-Baba et les 40 voleurs », « Aladin et la lampe merveilleuse », et « Le dormeur éveillé ». On notera que les compositions musicales de ce spectacle joué au Théâtre Alpha-347 dès 1968 étaient signées par Teddy Lasry, musicien aux multiples facettes, ayant notamment participé à l'odyssée Magma et enregistré quelques albums expérimentaux dans le domaine de la musique électronique dans les années 70/80.
En ces ouvrages scéniques très colorés pour le jeune public dont celui de Boc, Boboc et Boloboc, Camillo Osorovitz utilise une technique de projection visuellement proche de la lanterne magique, ainsi que de la polyvision d'Abel Gance (comme évoqué à l'époque par Michel Mardore dans Le Nouvel Observateur), voire du cinérama puisqu'il expose sa mise en scène sur trois ou six écrans dans le même temps, multipliant ainsi les actions et les tableaux de son récit pour tendre vers une certaine animation des images. Aussi bien qu'ayant une certaine mouvance, les personnages ne font pas preuve de mobilité ou de mouvement et sont animés essentiellement au travers des effets de lumière ou de changement de dessins où les personnages passent d'une pause à une autre.
Camillo Osorovitz conçoit ainsi le petit univers télévisé de Boc, Boboc et Boloboc dans la même perspective et technicité que ses spectacles qu'il dessine pour le jeune public avec du papier découpé dont il façonne les diverses parties et membres des personnages qu'il assemble, et fait de même pour les éléments du décor. Au travers de la petite lucarne, l'ensemble, quoique expérimentalement intéressant et visuellement d'une poétique enfantine, reste quelque peu statique malgré les différentes utilisations des plans jouant sur des effets visuels touchant à la fois au théâtre et à l'animation.
Cette série qui n'était donc pas animée dans le sens entier de cette technique participait au paysage d'alors du Service de la Recherche de l'ORTF et sa forme faisait également écho à certains travaux sur l'image de Jean-Christophe Averty qui, justement lors de la diffusion du 1er épisode des aventures de Boboc et ses amis le samedi, était présent en soirée sur le petit écran produisant une émission de divertissement avec notamment Grosso et Modo (il faut souligner que Jean-Christophe Averty était à l'époque omniprésent dans la petite lucarne).
Pour transmettre un peu plus de vie à la forme, les voix des artistes posées sur les personnages avaient en ce cas une grande importance puisqu'elles apportaient beaucoup de matière aux marionnettes de papier plat et sans mouvement en appuyant et gonflant les caractères et humeurs des protagonistes, et ce en s'inspirant du jeu d'acteur pour le théâtre de marionnettes. Les dialogues étaient en ce sens fort bien écrits, liant humour et poésie, tout en jouant avec les mots. A propos encore des voix et de leur identité liée aux personnages, on remarquera que Boloboc a un caractère assez proche de celui du chien Jupiter dans la série Arago X-001 (1973) de Jean Image dont on retrouve justement à l'égard de ce dernier une substance de son univers précédemment marqué par la voix de Linette Lermercier qui y doublait le célèbre personnage de Joe et qui prête ici sa voix à Boboc. L'univers de Camillo Osorovitz a d'ailleurs un petit quelque chose de celui de Jean Image dans une certaine mesure touchant à la poésie de l'enfance, l'un venant d'ailleurs de Bucarest et l'autre de Budapest.
En matière d'animation, c'est vers Prague que se porte plus particulièrement le regard de Camillo Osorovitz, celui-ci admirant les ouvrages de Jiri Trnka qui tout comme lui était illustrateur et œuvra pour le théâtre. A cet effet, bien que la forme diffère, on peut souligner que Jiri Trnka avait lui aussi réalisé en 1951 un court métrage non animé intitulé Le Poisson d'or / O zlaté rybce (adaptation du Conte du pêcheur et du petit poisson de Pouchkine), ouvrage considéré d'animation mais qui en fait était une suite de dessins fixes tel un album jeunesse auquel on aurait ajouté la voix d'un narrateur (concernant l'introduction évoqué plus haut avec la présence du jeune Patrice se faisant conteur, bien que ces personnages sont des protagonistes de l'histoire, on notera qu'un jeune garçon et une jeune fille sont mis en scène dans le film d'animation Le Rossignol et l'empereur de Chine que Jiri Trnka réalisa en 1948, conte sur lequel travailla en 1969 aux décors et costumes Camillo Osorovitz pour la pièce Le Rossignol et l'oiseau mécanique sur une mise en scène de Maurice Yendt).
Quant à la musique accompagnant cette aventure, elle était composée par le prolifique Jean Wiener (1896-1982, père de l'actrice et autrice-compositrice-interprète Elisabeth Wiener) que Camillo Osorovitz connaissait depuis quelques années déjà pour avoir œuvré aux décors ou costumes sur des pièces de théâtre pour lesquelles le musicien signa des partitions (comme en 1966 Un chapeau de paille d'Italie d'Eugène Labiche et Marc-Miche sur une mise en scène d'Edmond Tamiz avec Pierre Hatet dans le rôle de Fadinard). Jean Wiener est aussi particulièrement connu pour avoir recomposé la musique de Chicken Reel (1910) de Joseph M. Daly, ce pour en faire le générique de l'émission Histoires sans paroles (1964-1986).
Les aventures de Boboc prendront également vie en 1980 en un album jeunesse publié aux éditions Epi-Magiscope. Tout simplement titré Boboc, le personnage apparaissait sur la couverture du livre en plusieurs représentations de différentes couleurs tel un arc-en-ciel (comparaison faite par Patrice dès le premier épisode de la série). Camillo Osorovitz, auteur et illustrateur de l'album, signa en cette période de nombreux autres travaux éditoriaux pour la jeunesse, des albums comme celui-ci avec Marjolaine et le poisson rouge (Hachette), Marjolaine et le roi des papillons (Hachette), Le Kiosque à musique (Flammarion, collection Père Castor) ou C'est ma pomme à moi (Epi, collection Magiscope) et Pic, Palac et le père Noël (Epi, collection Magiscope). Quelques autres albums jeunesse auront pour titres des noms rappelant quelque peu ses racines roumaines comme Kitzi Busch, Birlic, ou Pitic champion de foot (Magnard), et le nom de Boboc justement en est lui aussi originaire comme ceux de quelques autres personnages que ce dernier côtoie.
Camillo Osorovitz participa également au magazine pour la jeunesse Pistil, la revue des jeunes et de la nature (9 numéros mensuels de mai 1977 à janvier 1978 puis 71 numéros hebdomadaires de février 1978 à juin 1979) où il dessina des bandes dessinées aux couleurs toujours attrayantes comme Petite Lune (4 pages x 25, février à juillet 1978) écrite par Elisabeth Briot et dont l'histoire de la jeune héroïne, une indienne des plaines d'Amérique du Nord, partage quelques liens avec celle de Boboc puisqu'il y est question également de voyages dans l'espace (parmi les nombreux artistes et bédéistes participant à cette publication mettant en avant le thème de l'écologie et qui attisait alors une joyeuse sympathie figuraient Denis Dugas avec sa « Pisti-encyclopédie » ou encore Claude Pierrard et son « Telex nature »). Camillo Osorovitz fut également présent dans le magazine Perlin et Pinpin avec Pac, Patrac, Patatrac et le petit nuage (Fleurus, collection Les albums de Perlin), les noms des trois petites souris héroïnes de cet album rappelant évidemment la forme nominative du trio Boc, Boboc et Boloboc.
Doublage
Voix françaises :
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