La Petite Fille aux Allumettes (Disney)

Dans la Russie des Tsars, alors qu'un hiver glacial s'abat sur Saint-Pétersbourg, une jeune fille sans le sou vagabonde dans les rues en essayant désespérément de vendre des allumettes, mais est copieusement ignorée par la population.
Epuisée et frigorifiée, elle finit par se résoudre à craquer progressivement ses allumettes invendues et chaque flamme déclenche chez une elle une vision d'une vie meilleure, où elle mangerait à sa faim, sans connaître le froid et où elle serait heureuse auprès de sa grand-mère.

Les heures ont passé. Toutes les allumettes ont été brûlées. La petite fille voit l'esprit de sa grand-mère devant elle et son âme est alors emportée tandis que son corps inanimé gît dans la rue couverte de neige et qu'une étoile filante traverse le ciel.

La Petite Fille aux Allumettes est un conte écrit par le célèbre auteur danois Hans Christian Andersen et publié en 1845. Malgré sa tristesse, cette histoire très touchante est rapidement devenue très célèbre et a été adaptée plusieurs fois, en musique comme au cinéma.

Ce court-métrage qui l'adapte a été produite aux studios Disney, qui avaient déjà puisé plusieurs fois dans le catalogue d'Andersen par le passé (notamment avec La Petite Sirène), et continueront d'ailleurs à le faire par la suite (La Reine des Neiges). La mise en scène est quant à elle signée par Roger Allers, co-réalisateur du Roi Lion.
Ce charmant petit film faisait à l'origine partie d'un projet plus vaste, à savoir une nouvelle suite de Fantasia, fameux film d'animation musical à séquences de 1940. Walt Disney avait en effet rêvé que Fantasia ressorte régulièrement dans les salles, avec de nouvelles séquences remplaçant progressivement les anciennes, une ambition bien trop grande qui ne put jamais être réalisée. Plusieurs décennies plus tard, Roy E. Disney, le neveu de Walt, mit toutefois en chantier Fantasia 2000 qui mettra en scène de nouvelles séquences (dont l'une d'entre elles, Le Petit Soldat de Plomb, adapte également un conte d'Andersen !) côtoyant celle de L'Apprenti Sorcier. Malgré un succès très relatif de ce nouvel opus, Roy voulut persévérer et sortir un Fantasia 2006 reprenant le même concept (mais avec des musiques du monde entier et plus seulement issues du répertoire classique). Bien que plusieurs séquences prévues pour ce troisième volet seront achevées, le long-métrage lui-même sera finalement abandonné, la firme se détournant progressivement de l'animation traditionnelle.

La Petite Fille aux Allumettes fait donc partie de ces segments ayant malgré tout été terminés, au même titre que Lorenzo, Un par Un ou le cas particulier de Destino. Il est accompagné pour sa part par une musique classique d'Alexandre Borodine, ce qui le rend plus proche de l'esprit des deux Fantasia que ses homologues (ironiquement, le morceau initialement envisagé était Clair de Lune de Claude Debussy, déjà adapté dans une séquence coupée du film de 1940 !).

Le choix d'une musique russe (interprétée par le Quatuor Emerson) est cohérent avec l'une des particularités de cette adaptation qui place l'intrigue à Saint-Pétersbourg, le réalisateur étant particulièrement friand de l'architecture de cette ville et estimant que la Russie, connue pour ses hivers rudes, était un cadre idéal pour cette histoire où le froid a une importance capitale.
Le court-métrage respecte au demeurant largement le conte original, bien qu'il mette de côté certains éléments comme le personnage du père (dont la fille redoute les coups si elle rentre sans argent gagné). Mais le dénouement tragique répond bel et bien présent, ce qui est étonnant pour un dessin animé Disney, et ce qui ne fit pas sans causer des débats durant la production (d'autres fins, plus heureuses, furent un temps envisagées) avant que le réalisateur n'obtienne gain de cause.

Ce court-métrage est l'une des dernières productions réalisées en animation traditionnelle par Disney dans les années 2000, le studio ayant à l'époque commencé à s'en détacher de plus en plus pour privilégier l'ordinateur. Il est d'ailleurs le tout dernier dessin animé à utiliser le CAPS, ou Computer Animation Production System, logiciel d'encrage et peinture numérique (que Disney avait ironiquement employé pour la toute première fois sur la dernière scène de La Petite Sirène !).
N'étant pas une production jugée prioritaire, il y eut un certain roulement dans l'équipe (ses membres étant régulièrement appelés sur d'autres projets et donc remplacés par d'autres), ce qui compliquera la tâche de Roger Allers qui sera néanmoins assez satisfait du résultat final.

Privé de la mise en lumière qu'aurait pu lui apporter le Fantasia 2006 avorté, La Petite Fille aux Allumettes sera néanmoins projeté au festival du film d'animation d'Annecy le 5 juin 2006 avant d'être proposé en bonus de la réédition de La Petite Sirène en DVD quelques mois plus tard (il conservera ce statut lors des ressorties vidéos suivantes). Il figurera également sur la compilation Blu-ray (inédite en France) Walt Disney Animation Studios Short Films Collection en 2015 avant d'être proposé sur la plateforme de streaming Disney+.

Production Disney méconnue, ce court-métrage reste pourtant assurément l'un des plus poignants produit par la firme aux grandes oreilles...