Liste
- Alain Chaufour
   Animateur Récré A2
- Annabelle Roux
   Alex dans Cat's Eye, Georgie
- Corbier
   Récré A2 - Club Dorothée
- Donald Reignoux
   Shinji dans Evangelion
- Eric Legrand
   Seyar (CDZ), Végéta (DBZ)
- Marie Dauphin
   Animatrice Récré A2
- Mathias Kozlowski
   Olivier dans Olive et Tom
- Michel Elias
   Pumbaa, Teletactica, Zeltron
- Pascale Jacquemont
   Wattoo-Wattoo, Super Nanas
- Philippe Ogouz
   Ken, Capitaine Flam, Edgar...
- Thierry Bourdon
   Ramis (Albator 78), Théo
- Thierry Ragueneau
   Matt Tracker, Marsupilami
Interview Mathias Kozlowski
Mathias a marqué de sa voix le personnage d'Olivier Atton dans "Olive et Tom". C'est avec une grande gentillesse qu'il s'est livré à une interview-fleuve.

Planète Jeunesse : Comment êtes-vous devenu comédien, Mathias ? Pour ce qui est du doublage, si je ne me trompe pas, vous avez commencé sur le film des "Goonies" de Steven Spielberg en 1985. Comment avez-vous été engagé ?

Mathias Kozlowski : A l’age de 4 ans ½, j’ai commencé à prendre des cours de piano. Ça a plutôt bien fonctionné au point d’en avoir fait pendant 16 ans ; j’ai finalement arrêté car je ne me voyais pas devenir interprète classique et à l’époque je n’avais pas goûté aux autres formes musicales tel que le jazz... J’ai arrêté mais je n’ai pas abandonné : je fais presque quotidiennement du piano et ne désespère pas un jour d’avoir le temps de me consacré d’avantage à la composition. Bref, tout ça pour dire que ma mère, au vu de mes résultats pianistiques, m’a inscrit à l’Ecole des Enfants du Spectacle. Ecole à horaires aménagés, elle permet aux enfants qui y sont inscrit d’assouvir leur activité artistique ou sportive dans une perspective professionnelle. Le caractère particulier de cette école intéressait les directeurs de casting et souvent à l’heure de la récrée, des castings étaient organisés. C’est ainsi que j’ai fait mes premiers pas au théâtre (« Médée » à l’Odéon), à l’opéra (« Le petit ramoneur » à l’Opéra Comique), à la télévision (« Sido Rémi » dans Récré A2) mais aussi au doublage avec « Cuore » de Luigi Comencini. Cet enregistrement n’a pas vraiment débouché sur quelque chose de sérieux dans ce métier mais il m’a valu d’être repéré par la mère de Damien Boisseau, que l’on ne présente plus, et qui a proposé mon nom à Jenny Gérard alors qu’ils leur manquaient un enfant pour effectuer la distribution des « Goonies ». C’est là que tout à véritablement commencé pour moi...

P.J. : Trois ans plus tard, vous avez fait "Olive et Tom". Est-ce que vous pouvez nous expliquer les conditions particulières de ce doublage (notamment les horaires et le rythme d'enregistrement) ? Enregistriez-vous en découvrant le texte (comme c'était le cas dans d'autres sociétés comme la S.O.F.I. par exemple) ?

M.K. : C’était l’époque de la 5ème, chaîne de télévision qui a fait les beaux jours du doublage en France ! Je ne sais pas si tout cela était bien légal mais il est vrai que pour différentes raisons propres à chacun, on s’était mis d’accord sur le fait d’enregistrer le soir. On enregistrait 3 épisodes par soir, 2 soirs par semaine je crois. Nous alternions les « Olive et Tom » avec des « Claire et Tipoune » où Barbara Tissier s’en donnait à cœur joie dans le rôle de Tipoune avec son « Boboooo !!! » légendaire pour ceux qui connaissent la série. Cela faisait de grosse journée : lycée à Montaigne à Paris à 8h, piano en rentrant à la maison puis doublage le soir jusqu’à parfois 2, 3h du mat… nous étions fous :) Mais c’était amusant… nous formions une chouette équipe qui n’oubliait pas de se distraire à l’aide de parties de Kems et même d’un freesbee auquel nous jouions dans les couloirs des audis ! D’un point de vue qualitatif, avec le recul, je m’aperçois aujourd’hui que nous allions sûrement un peu trop vite (je m’exprime ainsi pour ne pas être trop sévère avec nous même alors que je n’en pense pas moins ). En effet, nous ne lisions pas, ne relisions pas et accélérions dans les scènes où ça court derrière le ballon pendant des heures ! C’était l’époque, la masse de boulot qui voulait çela, mais aussi peut être hélas, le fait qu’il s’agisse d’un dessin animé japonais dont l’impact était alors sous estimé… Aujourd’hui, je pense également, que cette époque faste de la 5ème est à l’origine du déclin de la profession. Mais c’est un autre débat.

P.J. : Quel est votre meilleur souvenir de doublage ? Et le pire ?

M.K. : Mon meilleur souvenir est sûrement celui de mon excitation d’enfant à participer chaque année, pendant 3 années de suites à un des longs métrages de noël avec cette équipe de potes constituée lors de l’enregistrement des « Goonies »… Je pense notamment à l’enregistrement de « Stand by me ». Le pire ? Ce n’est pas un souvenir mais cette idée, que nombre de ceux qui ont connu une autre époque partage, que notre métier se dégrade un peu plus chaque jour. Que le doublage n’est pas reconnu, que seule l’étiquette VF sur un DVD compte, peu importe la qualité du travail effectué, qu’il est de plus en plus dur de se faire respecter pour défendre un minimum de qualité dans le résultat et dans le travail amenant à ce résultat.

P.J. : Au Japon, les comédiens de doublages (appelés "seiyu") sont de véritables stars: ils enregistrent des albums de chansons et de "drama" (des dramatiques comme celles qu'on faisait autrefois à la radio mais sous forme de CD), ils font des concerts et ont même un journal qui leur est dédié. Aimeriez-vous que ce phénomène soit le même en France ?

M.K. : Je n’ai pas de frustration à travailler dans ce qui est parfois appelé le métier de l’ombre. Le doublage est un service, un service artistique. Je n’ai pas d’autre prétention que me faire plaisir en contribuant au plaisir du spectateur car je n’oublie pas ce mot « service ». Avant d’en arriver à une glorification du métier, j’aimerais déjà que nos supérieurs n’oublie pas le mot « artistique ». Maintenant, il est évidement très agréable d’être invité à des salons, d’être interviewé ou de recevoir des remerciements tels que celui de Julien Helias (NDLR: Darkjul) que vous devez connaître…

P.J. : En ce moment nous assistons au phénomène inverse ici, puisque ce sont des stars qui viennent au doublage. Quel regard portez-vous là-dessus ?

M.K. : Quand j’ai vu le père noël de Nagui il y a quelques années, j’ai fait aïe ! Aujourd’hui, je constate quelques réussites… J’ai dirigé un film avec des stars… Je n’ai rien contre le principe, nous sommes tous comédiens (c’est pour les opérations marketing avec des non comédiens que j’aurais une réserve) : qu’ils soient les bienvenus ! Ils ressortent tous de cette expérience en étant étonnés de la difficulté de l’exercice technique… Ce ne peut être que bon pour notre publicité et puis cela nous permet en interne de constater que contrairement à ce que l’on nous dit, il peut y avoir de l’argent dans le doublage !

P.J. : Vous dirigez aussi des doublages, en particulier ceux du studio Ghibli ("le château dans le ciel", "le voyage de Chihiro"). Comment vous a t'on proposé ce travail ?

M.K. : On m’a proposé ma première direction à l’age de 19 ans. Pour des raisons militaires je n’ai réellement commencé qu’une année plus tard. Je pense que Jenny Gérard à qui je dois cette proposition a vu en moi une certaine expérience, une certaine idée du travail malgré mon jeune age. Nous sommes nombreux à lui devoir cette chance qu’elle a su nous donner : elle est à l’origine de beaucoup de voix célèbres. Depuis j’exerce discrètement ce poste mais en étant toujours très investi car j’aime l’idée de responsabilité qui y est associée. Il est vrai que Boualem Lamhene de Disney m’a confié les derniers Ghibli et je l’en remercie. Ce sont à mon goût de superbes films et en participant à leur version française, je retrouve, aussi parce les héros sont des enfants et que je travaille exclusivement avec des enfants, l’excitation dont je vous parlais. J’ai eu dernièrement l’occasion d’effectuer une autre direction plaisir : la nouvelle version française des « Dents de la mer » #1. Pour des raisons techniques, le DVD 5.1 qui sortira prochainement est une nouvelle édition entièrement refaite…

P.J. : Allez-vous diriger "la petite sorcière" (le prochain film du studio Ghibli annoncé chez nous) ?

M.K. : Je ne peux rien dire de plus qu’ « avec plaisir » ! (NDLR: cela s'est confirmé depuis notre interview)

P.J. : Vous êtes professeur de C++ et de programmation évenementielle. Pouvez-vous nous expliquer en quoi cela consiste ?

M.K. : Oulah ! Vaste sujet. C’est un langage de programmation orientée objet. Bref, un monde totalement opposé à celui dont nous parlons depuis le début. Je suis passionné d’informatique ; j’aime le développement. En sortant de mes études, le directeur informatique de mon école d’ingénieur – l’EFREI – m’a proposé d’assurer l’enseignement du C++ mais aussi de créer un cours de programmation événementielle (programmer Windows par exemple pour simplifier). Les 6 années de cours que j’ai pu dispenser ont été un plaisir, faire naître des passions chez certains élèves, passions qui les porteront dans leur carrière professionnelle est extrêmement gratifiant. J’ai néanmoins dû arrêter pour des raisons d’emploi du temps mais aussi parce que la correction de copie est un exercice, lui, très pénible : chapeau bas aux enseignants de carrière…

P.J. : Sur le site de Barbara Tissier, on peut écouter des musiques que vous avez composées (sur "les 2 timides"). Depuis quand en écrivez-vous ?

M.K. : J’ai toujours été plus attiré par la composition que par l’exécution en ce qui concerne le piano… « Les 2 timides » a été pour moi l’occasion de participer à une riche expérience amicale… Pour répondre à la question, j’ai dû poser une note sur une partition pour la première fois à l’age de 15 ans mais je ne me souviens plus trop ce que c’était :) Aujourd’hui, j’avoue ne pas écrire beaucoup mais la composition de musiques de film a toujours été un rêve inaccessible… peut être qu’un jour je me donnerai les moyens d’en approcher.

P.J. : Avec tout ça, avez-vous encore le temps de faire des recherches au CNRS ?

M.K. : Non, le CNRS a été une fantastique expérience de 7 ans, le soir, la nuit en parallèle de mes études et du doublage… même si je reste en contact avec Luc Damé, le directeur du laboratoire d’interférométrie solaire pour lequel j’ai travaillé, je n’ai plus le temps d’y aller. Voilà encore un monde bien différent, celui de la recherche…

P.J. : Finalement quelle est l'activité que vous préférez ?

M.K. : J’aime cette combinaison d’activités dans laquelle j’ai la chance de pouvoir me réaliser. Aujourd’hui, j’aimerais redevenir un peu plus comédien, le titre de directeur artistique fait toujours oublier celui de comédien auprès des autres directeurs artistiques... J’aimerais également être un peu plus impliqué dans le monde informatique. J’ai un projet personnel d’envergure dont j’aurai j’espère l’occasion de vous reparler mais il est vrai que le phénomène Windows Longhorn, le Windows de 2006, ne m’est pas indifférent. Il me serait agréable d’y participer… affaire à suivre.

P.J. : Quels sont vos loisirs et / ou vos passions ?

M.K. : Je crois qu’entre la musique, l’audiovisuel et l’informatique, je trouve mon équilibre ! Cela dit, il est vrai que je m’accorde du temps pour faire du sport, que l’aviation m’est très chère même si sur Paris cela reste du domaine du luxe, et qu’en ce moment je prend énormément de plaisir à aller faire du karting !

P.J. : Merci beaucoup Mathias !



Auteur : Arachnée
Date interview : 7 décembre 2003